Valls, dégage !

Valls SarkozyL'expulsion de Leonarda, jeune kosovare de 15 ans, lors d'une sortie scolaire dans le Doubs est non seulement choquante, elle est également intolérable. Elle jette un voile honteux sur notre République. Parlons d'abord de l'aspect moral de l'affaire, avant de parler de ses aspects juridiques. Nous sommes censés avoir un gouvernement de gauche. Qui doit donc, c'est ce qu'il avait promis à ses électeurs, engager une rupture avec l'ordre sarkozyste et antirépublicain d'avant 2012. Sur le plan de la sécurité comme sur le plan économique, il n'en est rien.

Manuel Valls récidive : après ses déclarations sur les Rroms ( ici ), voici que les actes suivent le discours. Déclarant avoir agit avec « fermeté », il a en fait poussé toute son administration à la culture du chiffre. Ce qui est dans la droite ligne de la politique engagée place Beauvau depuis 2002. La défense de Manuel Valls est simpliste, reprise par tous les défenseurs du Ministre. « Il ne savait pas », « c'est de la faute du préfet », voilà les refrains entonnés par cette droite qui ne dit pas son nom. Un autre son de cloche vient éclaircir la situation. Il provient d'un homme de terrain, très au fait de ce qu'il s'est passé lors de l'interpellation. Pour Eric Alauzet, député EELV du Doubs, il est « difficile de mettre en cause le préfet », puisque celui-ci n'était pas au courant de la sortie scolaire et de la situation de Leonarda. Même le Président du Conseil Général du Doubs soutient le préfet contre ceux qui cherchent à l'attaquer ! Pour nous, il n'est qu'un seul responsable, et ce même s'il était avéré que le préfet a fait preuve de zèle ou « d'inhumanité ». C'est son supérieur hiérarchique, à savoir le Ministre de l'Intérieur.

Que ce soit directement où indirectement (par la politique du chiffre, la course à l'expulsion et à la fermeté), Manuel Valls est le principal coupable, je dis bien coupable, de la situation intenable de l'adolescente et de sa famille.

Petit point géopolitique, très simple mais pourtant totalement ignoré. Beaucoup de voix s'élèvent pour dire que « renvoyer au Kosovo, ce n'est pas renvoyer en Afghanistan, c'est différent ». En effet, plusieurs milliers de kilomètres séparent ces deux destinations... Voilà la différence, et la seule. Politiquement parlant, la situation dans les Balkans est instable, surtout depuis la déclaration d'indépendance du Kosovo en 2008. Cette indépendance, non-reconnue par la Serbie qui souhaite l'indivisibilité de son territoire pose problème aux populations locales. La voix des armes n'est plus pour l'instant, c'est un fait. Mais rien ne garantit qu'elle ne refasse pas son apparition. La communauté serbe du Kosovo, victime de brimades récurrentes de la part de la population albanaise, tend à se radicaliser. Face à cela, les albanais font de même. Les tensions montent dans ce « pays », qui est toujours un baril de poudre en Europe malgré la cécité médiatique. Le deuxième danger pour Leonarda et sa famille vient également de son appartenance à la communauté Rrom. Et oui, les Rroms ne sont pas simplement Bulgares ou Roumains ! Peuple nomade, ils peuvent être de n'importe quelle nationalité … Même française, n'en déplaise au FN où à son ministre Valls. Comme dans beaucoup de pays, le Kosovo pratique une discrimination énorme vis à vis des Rroms sur son territoire. Tout comme les Serbes, les Rroms sont victimes d'une politique ethnique humainement scandaleuse.

Passons maintenant au volet judiciaire. Je ne suis pas un spécialiste comme mon ami Jean-Maxime Schopy. Mais je regarde un petit peu partout, pour trouver les tenants et les aboutissants de l'affaire. Et si la loi française n'a pas été modifiée depuis l'ère Sarkozy (encore un exemple de renoncement politique du gouvernement), l'article 3 de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant précise quand à lui que « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ». Où est l'intérêt de l'enfant à le renvoyer dans un pays en tension ? Où est l'intérêt à la couper de tout son réseau de socialisation ?

Pour terminer cet article rédigé sous le coup de la colère, celle d'un citoyen républicain, donc attaché à la gauche, à ses valeurs et à sa vertu, je vous engage toutes et tous à réclamer la démission de Manuel Valls. Plusieurs organismes la réclament déjà, comme le Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon. Nous nous associons à cette démarche. Un ministre de la République, surtout s'il se dit de gauche (même ce terme ne lui convient pas du tout), ne peut bafouer une humanité qui doit nous lier tous. Exigeons le retour immédiat de Leonarda et de sa famille qui, pour contrer encore une fois M. Valls, étaient parfaitement intégrées notamment du fait de la scolarisation de leur fille.

Manuel Valls récidive dans sa politique antirépublicaine, il doit être sanctionné. Ce serait agir avec « fermeté ».

Alexandre Emorine

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