Libéralisme – Plaidoyer Républicain https://plaidoyer-republicain.fr Wed, 03 Jan 2018 11:02:43 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=4.9.3 56743480 Faire vivre la nation pour renouer avec la République https://plaidoyer-republicain.fr/faire-vivre-la-nation-pour-renouer-avec-la-republique/ https://plaidoyer-republicain.fr/faire-vivre-la-nation-pour-renouer-avec-la-republique/#respond Thu, 04 Dec 2014 15:42:27 +0000 https://plaidoyer-republicain.fr/?p=695 ...lire la suite ]]>

La situation politique de notre pays – et plus largement de notre continent – est plus qu'alarmante. Replis sur des identités religieuses ou ethniques deviennent une norme là où la république n'est pas. Ou plutôt là où elle n'est plus. Une immense partie du spectre politique, syndical et social de notre pays a abandonné toute grille de lecture républicaine des événements pour se concentrer exclusivement sur ce que Lénine appelait du « trade-unionisme » sans dimension politique véritable. Oui, la résolution de problèmes immédiats est Valmy vive la nationcentrale pour la vie des citoyens. Mais ce n'est pas une fin en soi. Il faut revenir à certains fondamentaux pour donner un objectif de fond à une action politique tournée vers l'émancipation humaine. Pour cela, il nous faut lutter contre la triangulation réalisée par les adversaires de la République. Il est donc impossible de commencer cet article sans poser comme préalable le fait que non, le FN n'est pas un parti républicain. Non, ses propositions ne rentrent pas dans le cadre du vivre ensemble à partir du moment où ils souhaitent instaurer une citoyenneté à deux vitesses, exclure de la communauté nationale toute une frange de la population et refuser l'essence même de la République Française : son universalisme. Les partisans de Marine Le Pen, ainsi que ceux de l'UMP, passent leur temps à se réclamer de la nation, à promouvoir et employer ce terme jusqu'à ce que les gens fassent irrémédiablement le lien défense de la nation = extrême-droite. Quel hold-up ! Les descendants idéologiques des émigrés de Coblence, des royalistes et des antirépublicains seraient les défenseurs du cœur politique de la République ? Impossible. Comment cette notion de nation est passée de la gauche à la droite de l'échiquier politique, et pourquoi les républicains doivent s'en ressaisir ?

Contrairement à de nombreuses idées reçues, les nations et les états-nations en Europe sont une création récente. La première nation véritablement créée, centrée autour du contrat politique républicain, est la nation française. Celle-ci ne remonte pas à une obscure « France millénaire » mais bien à la révolution française, cette rupture ayant fait d'un ensemble disparate de sujets une communauté de citoyens. La tradition politique française fait que les notions d’État et de nation se confondent étroitement. Cette conception française était loin de faire l'unanimité au XIXème siècle : d'autres peuples, dans d'autres contextes culturels et politiques trouvèrent dans la langue ou dans l'ethnie les fondements de leur nation. Les allemands en sont le meilleur exemple. Sur le fronton de leur parlement est écrit « Dem Deutschen Volke » (Au Peuple Allemand). Ici, les deux derniers mots impliquent, c'est la subtilité de la langue de Goethe, un aspect ethnique à la nationalité. À l'opposé du modèle français donc. Ernest Renan, dans son fameux discours « Qu'est ce qu'une nation ? »  le démontrait parfaitement. En tant que français, il est impossible de concevoir une nation fondée sur une famille linguistique, « apparue il y a quinze ou vingt mille ans » ou sur une ethnie renvoyant à « des ténèbres incalculables », dem deutschen volklorsque l'on est soi-même membre de la nation française sur le seul contrat politique qu'elle implique vis à vis de la République. Une nation, c'est un consentement, c'est le désir exprimé de continuer la vie commune et d'y adjoindre un nombre croissant d'humains. Oui, bien entendu, c'est moins transcendant qu'un « droit divin » du sang. Mais il n'est pas besoin de transcendance pour faire vivre le bien commun. Le réel est largement suffisant. Comme le dit Renan, une fois que l'on enlève toute la mystique théologique et métaphysique de la politique, il ne reste que l'homme. Et c'est ici que se trouve la nation. Elle se fonde dans l'intelligence humaine pour émanciper de toute soumission les citoyens qui la composent. Autant le dire tout de suite donc, le Front national, l'UMP et les tenants d'un nationalisme « exclusif » (au sens où il ne cherche pas à inclure de vastes pans de l'humanité au prétexte d'une religion ou d'une ethnie) sont dans la tradition nationaliste allemande. Avec tout ce que cela implique et a impliqué. Pas de point Godwin ici, seulement une constatation historique qui peut prêter à sourire.

Comment la nation est elle passée d'une valeur républicaine, révolutionnaire et émancipatrice (donc, si l'on doit schématiser –à gauche de l'échiquier politique–) durant tout le XIXème siècle à une notion renvoyant à l'exclusion de l'autre au XXème ?

Il n'y a pas qu'une explication et qu'un seul facteur à cela. Nous n'avons pas la prétention, en plus, de dresser ici une chronologie exhaustive et factuelle de ce basculement. Mais quelques événements restent centraux dans le basculement idéologique de la société française entre le XIXème et le XXème siècle. Premièrement, et il n'y a pas d'ordre chronologique dans les faits que nous allons aborder, l'affaire Dreyfus. Sans revenir de manière détaillée sur l'intégralité de cette époque, il faut bien se dire que ce moment, ce déferlement de haine et de tensions a structuré une frange de la société. Et même, il en a déstructuré d'autres. Et c'est ici que le bât blesse. Quelques années après l'affaire Boulanger, les droites – dans leur immense majorité antirépublicaines – avaient besoin d'un exutoire et d'un nouveau phénomène structurant : le complot contre Dreyfus est donc tombé à pic. De là à croire qu'il a été provoqué, il y a un fossé…que l'on peut franchir. Dénonçant le malheureux capitaine comme le bouc émissaire d'un complot contre la France au profit de l'Allemagne, l'extrême-droite trouva bien vite la raison de cette forfaiture : le capitaine Dreyfus était juif. Ainsi éclatait au grand jour ladreyfus germanisation politique de l'extrême-droite. Antiallemande en partie, par esprit de revanche, elle se trouvait adopter les codes sociaux, identitaires et politiques des penseurs nationalistes allemands du XIXème siècle selon lesquels la nation française serait une histoire de « race ». Dreyfus, par ses (non-)actes, montrait selon les antidreyfusards que la nation française n'avait rien à voir avec les juifs, vus comme biologiquement à part. Et c'est là le fond du problème. Malgré leur défaite devant l'épreuve des faits et le mouvement de soutien à Dreyfus, les antisémites, réactionnaires, monarchistes de tout poil réussirent une chose : instiller dans les esprits que la nation française est une ethnie, liée à une confession. Tout ce qui va donc à l'encontre de la tradition nationale de notre patrie.

Le nationalisme a lui même évolué à l'échelle européenne durant les deux derniers siècles. D'un nationalisme « d'existence », avec la juste aspiration des peuples à disposer d'eux-mêmes contre les empires autocratiques (russe, austro-hongrois, ottoman), nous sommes passés à un nationalisme « de puissance ». De lutte pour une suprématie d'un peuple sur un autre. En effet, une fois les revendications nationales d'indépendance ou d'unité (dans les cas allemands et italiens) abouties, comment arriver, pour les nouveaux régimes, à mobiliser leurs peuples ? En faisant une fois de plus jouer la carte de la menace extérieure et intérieure, en racialisant tout le débat de construction d'une nouvelle nation dans un nouvel espace. En découlèrent les revendications pangermanistes hitlériennes, panhongroises de l'amiral Hörthy (régime fasciste ayant dirigé la Hongrie jusqu'en 1945), etc … Cette mutation du nationalisme, à une époque où la France cherche elle-même à assurer son contrôle sur les territoires qu'elle colonise et administre, suscite un travestissement encore plus grand du sens même du mot nation dans notre pays.

C'est à ce moment-là que l'on peut commencer de dater le recul des forces progressistes sur cette question. Par la faute des monarchistes, des républicains modérés voire conservateurs et des traîtres à la patrie, le mot de nation a commencé à faire peur dans notre pays. Mais il ne suffit pas de rejeter la faute sur les ennemis du bien commun pour trouver l'explication de l'abandon de ce combat. Force est de constater que l'internationalisme a également eu sa part de responsabilité. La nation comme l'internationalisme ont été mal compris par une partie toujours croissante des forces progressistes. Une opposition entre ces deux termes a été induite par une large partie des mouvements de gauche au XXème siècle. À une nation confondue avec un nationalisme fascisant, on a opposé un internationalisme prolétarien no nation no order« béat ». Or, sans nation, il n'est pas possible d'avoir d'internationalisme. Et je ne parle pas ici du simple aspect linguistique de la construction de ces deux termes. L'internationalisme n'est pas « une seule nation mondiale » qui ferait fi des différences culturelles, historiques et politiques. C'est le lien entre les nations souveraines, la coopération dans le but de promouvoir la paix mondiale et l'élévation du genre humain. Que des solidarités se créent de manière « transnationales », c'est un fait. Mais ce n'est pas un simple internationalisme, c'est tout simplement de l'humanisme, dont il faut être aussi fier. Aussi fier que des liens entre les nations. Si l'un et l'autre peuvent exister séparément, l'articulation humanisme/défense de la nation est la garantie d'un ordre international juste, respectueux des indépendances et des intérêts de chacun.

Pourquoi la gauche doit se ressaisir de cette question ?

Dans la situation politique actuelle, il devient indispensable et urgent de se ressaisir de la question de la nation (comme de celle de la patrie et de ses symboles) dans notre pays. Sans mettre de côté l'économie et des conditions de vie qui ont une influence considérable, le vote d'extrême-droite s'explique également par une perte de repères. Par une perte de ce qui fait le lien entre les citoyens qui se sentent abandonnés : la République comme cadre politique, la nation comme contrat entre les parties du peuple. Il ne faut surtout pas abdiquer de ce combat. Non, on ne peut pas dire que quiconque défend la nation – donc la république – est d'extrême-droite. Ce serait hisser le drapeau blanc et déclarer, après 200 ans de lutte, que nous abandonnons notre poste de défense des conquis révolutionnaires et républicains. Ce serait également acter que nous avons tort lorsque nous disons que la nation française est un contrat de solidarité et d'entraide, et que « ceux d'en face » ont raison lorsqu'ils la voient comme réservée à une élite, à une frange toujours plus réduite des habitants de notre pays. Nous ne pouvons pas abdiquer non plus face aux tenants d'une ligne politique libérale et pro-européenne par défaut. Ceux-là ont probablement fait le plus de mal à la nation en culpabilisant et en renvoyant au passé ceux qui étaient les derniers à se battre pour la grandeur de cette dernière (je pense ici au Parti Communiste Français jusqu'au tournant euro-communiste des années Hue ou encore aux premiers partisans de Jean-Pierre Chevènement). Les amis de Cohn-Bendit et des soixante-huitards libertaires peuvent se frotter les mains. Ils ont réussi leur objectif : faire que la gauche donne les clés de la maison « nation » à la droite extrême. Ainsi, le combat pour la nation est aujourd'hui double. Dans la réappropriation du terme face à ceux qui le dévoient mais également dans la lutte contre le libéralisme. Ce dernier qui fait, par sa marionnette Valls, éclater la République avec la réforme territoriale. Qui brade, par son pantin Hollande, la souveraineté militaire française. Souveraineté militaire qui était également l'un des fondements de la nation française, la République s'étant imposée par de durs combats – armés comme civiques –.

soldat révolution

Je concluais l'article sur le patriotisme républicain en disant : « gardez-vous de ceux qui vous diraient que seuls les français peuvent être patriotes, c'est faux : il suffit d'être républicain ». Cette conclusion pourrait coller à cet article. La nation et la patrie républicaine sont tellement liées qu'on ne peut séparer ces combats. Faisons vivre l'idée de nation pour ce qu'elle est : le contrat de vivre-ensemble passé en faveur de la République.

Alexandre Emorine

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Sélection naturelle : de la science à l’humain https://plaidoyer-republicain.fr/selection-naturelle-de-la-science-a-lhumain/ https://plaidoyer-republicain.fr/selection-naturelle-de-la-science-a-lhumain/#respond Wed, 26 Mar 2014 15:24:02 +0000 https://plaidoyer-republicain.fr/?p=450 ...lire la suite ]]> simpsons-2013Je suis comme tout le monde, et chaque individu a des préférences et des passions aussi diverses que variées. Pour ma part, j’ai le goût de la science, et plus particulièrement de la biologie. Je vais parler ici d’un immense thème qui a changé la vision du monde, tel que l’homme se le représentait. Le sujet qui sera évoqué sera celui de la sélection naturelle. Il faut sortir des idées reçues et des poncifs que l’on entend à longueur de journée. Cette partie comprendra des notions et des définitions techniques, mais le principal but sera de les rendre accessibles aux lecteurs sans pour autant trahir les propos. On dit souvent que le savoir est une arme, et que l’acquisition de la connaissance est un acte émancipateur et libérateur. Le problème étant que cette thématique a été longtemps décriée, mal interprétée et utilisée à dessein. Malheureusement, je ne vois pas tellement de prise d’initiative permettant à tout un chacun de se saisir de la question. Communément, il est certain qu’il y a autant de définitions de la sélection naturelle que de personnes ayant un avis dessus. C’est un peu comme lorsque l’on dit qu’il y a 66 millions de sélectionneurs en équipe de France quand on voit le tombereau d’insultes des individus en désaccord avec les choix du sélectionneur.

Pardon par avance si des termes apparaîtront comme des repoussoirs mais un minimum de rigueur oblige également à la complexité. Avant de définir ce qu’est la sélection naturelle, il faudrait peut-être commencer par décrire la façon dont elle a été pensée et utilisée. Il est absolument nécessaire de comprendre que les théories libérales de l’économie ont indubitablement inspiré la façon d’appréhender la compréhension du vivant. En effet, picture_cost_benefit_analysisl’individu a souvent été l’unité de référence de la pensée théorique. Ayons tout d’abord à l’esprit que la détermination des bénéfices récoltés et des coûts subis par les individus ont une influence sur les choix comportementaux. Quel intérêt ai-je à faire telle action par rapport à une autre ? Depuis la sortie de la théorie de la sélection naturelle, ce processus a été compris comme étant d’une sorte d’état de nature où le plus fort survit au détriment du plus faible. Cela est répété sur tous les tons comme étant « la survie du plus apte ». Par la suite, les penseurs libéraux se sont historiquement saisis de ce résumé falsificateur pour inculquer aux gens que la solidarité n’existe pas, que l’individu s’émancipe par autonomie ou indépendance vis-à-vis des autres et donc que la coopération serait une vision idéologique et contre nature. L’individualisme serait par conséquent l’alpha et l’oméga des relations humaines.

Depuis la parution de « L’origine des espèces » de Charles Darwin en 1859, chacun peut comprendre que les progrès techniques ont nécessairement changé beaucoup de points quant aux propositions initiales sur le sujet. Ces progrès techniques et scientifiques ont permis de formaliser la Nouvelle Synthèse néo-darwinienne ou Théorie Synthétique de l’évolution. En effet, il a été incorporé à la théorie darwinienne les données modernes de la génétique, de la biologie du développement, de la paléontologie et de la systématique. Pour en revenir à la sélection naturelle, le meilleur moyen de l’appréhender est donc de la définir. Voilà une définition longue, précise, où chaque terme compte (Danchin, Giraldeau et Cézilly, 2005) :

« La sélection naturelle est un processus (Endler 1986), c’est-à-dire un ensemble de phénomènes reliés dans une chaîne causale. D’une part existent des conditions, indépendantes les unes des autres. D’autre part, lorsque ces conditions sont remplies simultanément, il en découle systématiquement des conséquences. Les conditions préalables à l’enclenchement du processus de sélection naturelle sont au nombre de trois :

(1) Il est une variation entre les individus pour un certain trait ;

(2) Il existe une relation cohérente entre ce trait et la capacité des individus qui possèdent le trait à survivre (par exemple la capacité à éviter les prédateurs) et/ou se reproduire (par exemple la capacité à acquérir un partenaire, fécondité…). En d’autres termes, il existe une relation cohérente entre ce trait et l’aptitude phénotypique. C’est ce que l’on appelle la pression de sélection ;

(3) Il existe une hérédité de la variation sur le trait considéré, indépendamment des effets liés au fait que les générations successives puissent se développer dans le même environnement. Le trait doit donc être héritable. »

Prenons un exemple : c’est toujours le même fameux exemple mais il reste simple pour appréhender le phénomène. C’est le cas de la phalène du bouleau, papillon (Lépidoptère) bien connu. Il existe une variation sur le trait de la couleur : blanc ou noir. La relation est cohérente entre se trait et sa capacité à survivre, éviter un prédateur et ou se reproduire. phalenes-du-bouleau_315Cette couleur est héritable. Maintenant, contextualisons le cas de la phalène. Durant la révolution industrielle en Angleterre, le développement des mines et du  charbon ont considérablement pollué et modifié l’environnement. Il y avait assez peu de phalène avec un morphe noir et la plupart avait le morphe blanc. Quand la pollution s’est répandue et que tous les arbres ont été recouverts de poussières noires, les phalènes blanches étaient très visibles pour les prédateurs, tandis que la minorité à morphe noir se cachait de fait beaucoup plus efficacement. Ils ont donc été moins prédatés que les morphes blancs et se sont par conséquent reproduit plus facilement.

Entendons-nous bien, lorsque j’utilise la définition de la sélection naturelle je n’ai pas la bêtise de transposer littéralement le propos au niveau de l’espère humaine. Mais par contre, cela n’a pas gêné une quantité non-négligeable d’individus de le faire. D’autant plus lorsque la transposition d’une définition est caricaturée et utilisée à dessein. L’avarice intellectuelle et la paresse idéologique des libéraux ont simplifié cette vision extrêmement complexe de la façon dont le monde et les interactions s’organisent par « la survie du plus apte ». Il faut affirmer haut et fort que ces conclusions ne sont rien de moins que de la fraude intellectuelle.

Pour tordre le cou à ces fables, poussons le raisonnement libéral jusqu’au bout. Prenons un individu théorique et définissons-le comme étant le meilleur parmi les meilleurs. Pour résumer, l’individu qui sera le plus apte à survivre et à se reproduire. Étudions-le par exemple dans les premières années de sa vie. La première étape qui commence la vie de n’importe quel individu est bien entendu la naissance. Le raisonnement libéral basé sur la mauvaise interprétation de la sélection naturelle pourrait nous amener à penser que les meilleurs seraient ceux qui n’auraient pas de souci pour naître. Admettons, mais chez les penseurs libéraux, un individu se suffit à lui-même et a pour conséquence que l’indépendance vis-à-vis d’autres individus est une norme sociétale. A titre personnel, je ne connais aucun individu susceptible de naître par génération spontanée, sans parent ou entourage, sans médecin et sans aucune aide extérieure. De ce point de vue, cet individu n’existe pas. Cet être suprême, qui serait sensé être l’individu ultime, le plus apte, ne dépasserait même pas le premier jour de sa naissance. Mettons maintenant notre Adam-Smith en culotte courte sans école, sans professeur, sans parent et sans ami. Bref, le parfait individu qui s’émancipe de façon totalement autonome et individuelle. Et bien cet individu a existé, mais la finalité n’a évidemment rien à voir avec les résultats escomptés. Voyez plutôt. L’histoire se passe en Russie en 2009. La police a retrouvé une fillette de 5 ans qui a été surnommée Mowgli comme dans « le Livre de la Jungle ». Manifestement, la responsabilité des parents est lourde mais le sujet n’est pas là. Voilà une fillette qui a grandi avec des chiens et des chats pour l’essentiel. Elle était incapable de communiquer dans une langue intelligible mais avait par contre copié les comportements des chats et des chiens qui l’entouraient. Voilà une démonstration de plus qu’un individu seul ne se développe que de façon parcellaire. La doctrine libérale pure montre ses limites à la simple énonciation des faits. L’idéologie ne peut en aucun cas faire fi du caractère éminemment social de l’être humain.

Les concepts de sélection naturelle sont bien plus fins qu’il n’y paraît. Sortons un moment des considérations humaines et repartons sur le terrain de la biologie évolutive pure. Cela permet d’introduire un auteur important en évolution, Richard Dawkins. Ce biologiste a publié « Le gène égoïste » en 1976, mais la plupart des gens se sont arrêtés au titre. Cela arrangeait bien tout le monde de caricaturer le propos du livre. D’un côté, les libéraux qui voyaient en ce titre l’illustration ultime de leurs thèses. D’un autre côté, les individus refusant de voir le moindre côté égoïste allant jusqu’à comparer Dawkins à Hitler. Bien évidemment, aucune de ces interprétations n’est juste. Je vous conseille de le lire avec attention car à aucun moment il n’est question de dire que la coopération soit contre-nature. C’est même l’inverse. En effet, les processus de sélection naturelle tels que définis plus haut illustrent que l’on ne peut la résumer à la « survie de plus apte » Tu ne définis pas ce qu’est le gène égoïste. La coopération est au centre de nombreuses interactions dans la nature. Mais bien sur, c’est grâce aux progrès techniques notamment, que nous sommes en mesure de comprendre pourquoi la coopération a été sélectionnée, car elle est soumise à sélection. Afin de comprendre les raisons qui poussent les fourmis, les termites, les abeilles ou toute autre espèce d’individus à avoir un haut niveau de coopération, nous devons introduire un nouveau pan central de la pensée néo-darwinienne : la sélection de parentèle. Là encore, il ne faut pas perdre de vue que les raisonnements qui régissent les processus de sélection de parentèle (totalement inclus dans la théorie de la sélection naturelle) sont analysés en termes de coûts et de bénéfices. Je vais vous épargner les démonstrations mathématiques, mais le principe de la sélection de parentèle, crée par William D. Hamilton en 1976 (récompensé en 1993 d’un prix Crawford) tient à peu près en ceci : cette théorie démontre que, sous l’effet de la sélection naturelle au cours de l’évolution, il peut y avoir l’apparition chez des individus de comportements « altruistes » que l’on définira comme étant coopératifs. Généralement, la proximité génétique entre les individus est le facteur déterminant dans l’apparition et le développement de comportements de coopération. Pour résumer, vous aurez plus tendance à coopérer avec un membre de votre famille qu’avec un individu qui serait plus éloigné de vous génétiquement. Le degré de parenté entre les individus définit le niveau de coopération entre les protagonistes. Regardons maintenant dans la nature si cette théorie est infirmée ou confirmée. Trois exemples résumés en un seul permettent de répondre à cette question. Darwin n’a jamais compris à l’époque pourquoi les abeilles et les autres insectes sociaux vivaient ensemble avec des tâches spécialisées de certains individus qui, en plus ne se reproduiront jamais. En effet, il apparaît abeille-600pxtotalement illogique qu’un individu a priori égoïste saborde lui-même la transmission de ses gènes à la génération suivante. Prenons une ruche, tout ce qu’il y a de plus classique. Tout le monde sait qu’il n’y a qu’un seul individu qui produit des jeunes : la reine. Par conséquent, les abeilles de la ruche ont toute un degré d’apparentement élevé. Il est d’au moins 50% car toutes les sœurs ont la même mère, mais pas forcément le même père. Mais quand même, ce taux d’apparentement est très élevé. On commence à voir pourquoi la théorie d’Hamilton basée sur le degré d’apparentement permet de clarifier le niveau de coopération entre les individus. Maintenant, admettons qu’une abeille qui n’est pas reine se reproduise. Sa progéniture aura 50% de gènes en commun avec la mère, c’est-à-dire autant qu’avec toutes ses sœurs issues de la descendance de la reine. Cela montre, en toute hypothèse, pourquoi les abeilles ne se reproduisent pas et investissent leur énergie dans les nurseries ou l’exploration pour la nourriture (le foraging). Je n’ai individuellement aucun bénéfice à pondre des œufs dans la nurserie car mes gènes ne se transmettront pas mieux que si j’investis dans le développement de la ruche. Bien sur, comme dans tout système il y a tricheurs. Il arrive que des abeilles tentent quand même de pondre en cachette, mais le coût à faire cela est immense. Voyez pourquoi. La science nous a également appris que dans les colonies d’insectes sociaux, des individus représentent en quelque sorte une police. Si vous vous faites attraper à mettre vos propres œufs, vous risquez la mort. Une abeille seule dans la nature, sans ruche et sans congénère est vouée à la mort. Le coût est infini pour un bénéfice nul. A la lecture de cet exemple, vous devriez arriver à la conclusion que la sélection de parentèle est une théorie permettant d’expliquer que dans la nature, la dissocietecoopération est un fait. Et que par conséquent, les gens qui vous disent matin midi et soir que la solidarité et la coopération ne sont pas nécessaires, ou n’ont pas vocation à structurer une société ou des comportements, sont de purs idéologues. Bien entendu, la transposition à l’espèce humaine amènerait des gens mal intentionnés à considérer qu’il ne faut coopérer avec personne d’autre que sa famille. Cela serait dangereux d’un point de vue idéologique et ne prendrait pas en considération que les liens humains ne se cantonnent pas à ce seul cercle familial. Jacques Généreux à très bien illustré les divers cercles de développement de l’individu dans la société par exemple. Je pourrais très bien arrêter ici le déroulement théorique permettant de comprendre les raisons qui vont pousser des populations ou des groupes d’individus à coopérer, mais je préfère enfoncer le clou en énonçant et vulgarisant un pan particulier des mathématiques essentiel à la compréhension de l’évolution de la coopération : la théorie des jeux. La suite au prochain numéro.

Arnaud Guvenatam

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Sarkozy est de retour : il s’appelle Hollande https://plaidoyer-republicain.fr/sarkozy-est-de-retour-il-sappelle-hollande/ https://plaidoyer-republicain.fr/sarkozy-est-de-retour-il-sappelle-hollande/#respond Sat, 04 Jan 2014 11:16:28 +0000 https://plaidoyer-republicain.fr/?p=192 ...lire la suite ]]> Sarko-HollandeMardi dernier, ont eu lieu les traditionnels vœux du Président de la République. Vous ne les avez pas vu ? Vous avez préféré passer la soirée avec vos proches à fêter dignement le passage à 2014 ? Bien vous en a pris. Mais vous avez donc probablement raté l'annonce phare de Hollande, ce fameux « pacte de responsabilité » tant vanté par le MEDEF. Passons le fait que toute annonce satisfaisant le MEDEF ne peut que nous alarmer, tant les intérêts de ce groupement patronal (je me refuse à parler de syndicat ici) sont contraires à ceux du peuple et à l'esprit partageux de la République. Eux ne voient que l'intérêt économique, financier et capitalistique de quelques-uns, lorsque la République ne reconnaît que l'intérêt général de tous ses citoyens, avec une vocation universaliste.

Bien entendu, nous aurions préféré entendre un discours offensif contre la finance, contre les abus d'un grand patronat devenu fou depuis bien longtemps. Mais juste avant, je me suis dit « Rapport Gallois, Crédit Impôt Compétitivité Emploi... On va se faire encore avoir ». et là, d'un coup, les mots furent lâchés : pacte de responsabilité. De responsabilité des entreprises devant l'Etat ? Devant les salariés ? Des responsabilité des dirigeants des grands groupes qui renvoient à une misère terrible des milliers de familles à travers le monde ? Pas du tout, juste une responsabilité « morale » où, devant une nouvelle baisse des cotisations patronales et sociales (d'ailleurs, le prochain qui parle de « charge » étant hors la loi, je propose que l'on dépose une plainte collective!), le MEDEF se dit prêt à « relever le défi », et à embaucher près d'un million de personnes ! Quelle honteuse abdication de l'état devant le patronat ! Encore, encore et encore. Cela en devient tellement répétitif que toute réaction ressemble à du déjà-vu... Et c'est exactement ce qu'ils recherchent !

L'annonce, comme toujours avec le duo Hollande-Ayrault, n'est pas encore expliquée concrètement. Il s'est agit avec cette annonce d'un os à ronger pour le patronat. Mais plusieurs journaux citent la lettre envoyée par Jean-Marc Ayrault au « Haut Conseil au financement de la protection sociale » démontrant la volonté du gouvernement : réduire la cotisation patronale famille, aujourd'hui équivalent à 65% du budget des prestations familiales dans notre pays. Voici le visage du social-libéralisme. S'attaquer à la politique familiale, probablement le seul type de prestations versé de manière universelle aux foyers français. Si ce projet se concrétise, si le MEDEF obtient gain de cause, et selon toute vraisemblance c'est ce qu'il se passera, le gouvernement PS-EELV aura réduit les cotisations familiales, relevé la TVA, cherché à baisser le prix du travail et fait le CICE. Soit, en somme, tout ce qui était contenu dans la fameuse TVA sociale de Sarkozy, pourtant abolie en 2012, comme un effet d'annonce dans la vague du « changement médiatisé ».

L'image parle d'elle même

Quelle trahison ! Chers lecteurs, surveillez cette affaire de près. Surveillez les sorties médiatiques des élus socialistes et de tous ceux qui défendraient ce dispositif antisocial. Retenez bien ce qu'ils diront, car lors des échéances à venir en 2014 ou encore après, vous verrez les défenseurs du gouvernement mettre en avant l'annulation des mesures Sarkozy en 2012, comme ci cela était une fin en soi. Rappelez leur toujours que les mesures économiques qu'ils ont mis en place depuis, au-delà de l'effet d'annonce, sont allées dans le même sens que celles prônées par la droite. Pire, elles ont même été plus loin dans la destruction programmée et voulue de notre système social à la française, puisque causées par le libéralisme prônant le « toujours moins d’État ».

À l'inverse, tendez la main à celles et ceux qui, de bonne foi, défendaient Hollande mais arrivent à un trop-plein avec cette annonce. Un élu socialiste rencontré par la rédaction ce mercredi ne cachait pas son exaspération devant ce pacte. « Cela fait 30 ans qu'on donne tout aux entreprises, jamais de contreparties ni d'effets positifs. Ça ne marche pas, pourquoi s’entêter dans cette voie ? »

Il a raison cet élu ! Hollande n'assume pas ses responsabilités. Il n'assume pas s'être trompé sur toute la ligne économique depuis son élection. Il assume encore moins – mais la tâche serait trop importante pour lui – l'échec du social-libéralisme et de ses vieilles recettes.

La soumission au MEDEF n'a jamais rien apporté de bon, préparez vous à lutter en 2014 ! Nous aurons besoin de toutes les énergies pour battre en brèche les projets du gouvernement, et engager la rupture avec les politiques libérales. Bien sûr, les élections municipales et européennes seront importantes. Mais ne soyons pas dupes : ce gouvernement est aveugle. Pire, il ne veut pas voir ce qui se passe et les effets désastreux de sa politique libérale. Nous devrons être beaucoup plus offensifs pour sortir le pays de la misère dans laquelle il s'enfonce ! Le peuple a mis une claque à Sarkozy en 2012, mettons-en une à Hollande en 2014 !

Alexandre Emorine

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